Biodiversité et développement durable

 

La biodiversité

La biodiversité est un concept global qui permet de poser un nouveau regard sur ce que l'on appelle patrimoine naturel, biosphère ou tout simplement nature. Elle sous-entend la variété et la variabilité du monde vivant à tous ses niveaux d'organisation, du gène à la population, de l'espèce à l'écosystème (FISCHESSER Bernard, DUPUIS-TATE Marie-France,1995).


Selon que l'on se place au niveau du systématicien, de l'écologue ou du généticien, la biodiversité revêt des considérations différentes, mais finalement chacun s'accorde à dire que la biodiversité constitue une richesse que nous avons le devoir de transmettre aux générations à venir, car elle est d'importance vitale.
Au cours des temps géologiques, la biodiversité a été en constante expansion depuis l'apparition de la vie, même si parfois, cette biodiversité a été ponctuée d'extinctions massives. Et ce, jusqu'à l'explosion démographique de la société humaine où sa régression a commencé et singulièrement au cours des trois derniers siècles de son histoire. Ainsi, depuis le XVIIème siècle, 2,1% des espèces de mammifères et 1,3% des espèces d'oiseaux se sont éteintes. L'homme de part la création de son éconosphère a donc créé une machine qui commence à vider la terre de sa diversité.

Les intérêts de protéger la biodiversité sont multiples (FISCHESSER Bernard, DUPUIS-TATE Marie-France,1995): 
Sur le plan économique, elle fournit la matière première de nos aliments, de nos vêtements et de nos médicaments (60% de nos médicaments sont issus du règne végétal). Elle représente aussi un réservoir génétique à long terme.
Sur le plan scientifique, la biodiversité est à l'origine de tous les mécanismes qui permettent à la biosphère d'assurer en permanence des tâches de protection et de régulation du climat et des flux vitaux. Appauvrir la biodiversité, c'est se priver de l'assurance que la biosphère pourra trouver des réponses évolutives appropriées aux problèmes futurs.
Sur les plans éthique et esthétique, la contemplation de la diversité de la vie est une source importante d'épanouissement personnel et de créativité.

Aussi, en application de la convention du Sommet de la Terre, l'UNESCO, notamment, a lancé un grand programme scientifique mobilisateur, le programme " Divertas ", qui a pour but de mieux comprendre les origines de la biodiversité et ses effets sur les écosystèmes et la biosphère. Au niveau européen, la directive " habitats " vise à protéger la faune, la flore mais aussi les milieux. Enfin, la France qui a pris relativement tôt conscience de la baisse de la biodiversité a mis en place des aires de protection stricte de la nature qui lui coûtent près de 13.000F/ha/an (FISCHESSER Bernard, DUPUIS-TATE Marie-France, 1995). La création de parcs nationaux, régionaux, d'arboretum ou encore la réintroduction d'espèces comme le lynx, l'ours… sont autant d'actions qui visent à reconstituer une biodiversité qui s'effrite. 

Ainsi, le loup qui est réapparu dans les Alpes de manière naturelle, n'en déplaisent à ces détracteurs qui pensent le contraire, doit au nom de la biodiversité être maintenu dans l'Arc Alpin français. Néanmoins, et c'est là tout l'enjeu des années à venir : aux vues des capacités d'adaptation du loup, doit-on le laisser s'étendre au point de le retrouver dans les décharges comme c'est le cas en Espagne…on retrouve ici les interactions existant entre la biosphère et l'éconosphère, qui à l'avenir poseront le problème de savoir si l'homme doit être acteur de la protection de l'environnement ou s'il doit simplement laisser des zones sauvages, réservoirs de biodiversité dans lesquelles il n'aurait pas sa place.

Considérons dans un premier temps l'argumentation des opposants au loup, lesquels contestent la nécessité de sa protection en France au motif que l'espèce n'est plus en danger d'extinction. Cette position n'est guère défendable, et ce à plusieurs titres :
- La protection du loup est une obligation juridique et politique
- Le loup est patrimoine vivant, il constitue une espèce indigène qui a toujours été présente sur notre territoire. Nous ne pouvons donc pas lui dénier un " droit de retour ".
- Des évolutions culturelles sont à prendre en compte, le rapport homme/nature a conduit à la disparition d'espèces. Le progrès fait payer un lourd tribu à l'environnement, avec toutes les conséquences pour les générations à venir.
Le loup est donc à ce titre un symbole de nature vierge retrouvée que l'on ne peut ignorer. Ainsi, ne pouvant remettre en cause la légitimité de la protection et du maintien du loup dans l'Arc Alpin français, la question aujourd'hui n'est plus de savoir pourquoi protéger le loup, mais plutôt de savoir comment le gérer au mieux dans la durée.

Dès lors que l'homme a pris conscience de la nécessité de préserver les écosystèmes terrestres (sauvage ou domestiqué) et la biodiversité pour les générations futures, il se doit de repenser la place qu'il occupe au sein de l'écosystème que l'on pourrait nommer " Terre Patrie ".
Ces changements profonds et collectifs ne peuvent être efficaces s'ils ne s'accompagnent pas du développement conjoint des autonomies individuelles, gages d'égalité et de cohésion sociale. Les divergences d'intérêt doivent être dépassées et un consensus doit être proposé en vue d'une cohabitation durable entre les espèces et d'un développement durable des espèces.



Le développement durable ?

Le développement durable peut encore être défini comme le développement qui permet de répondre aux besoins actuels de la population humaine, sans compromettre les possibilités des générations futures de satisfaire les leurs (YAKOWITZ Marilyn, 1997). L'éducation est à la base de ce développement durable. Elle permet de bâtir un plan d'action en vue de trouver un point d'équilibre entre les hommes, et entre les hommes et le milieu environnant.
Le plan d'action s'appuie sur plusieurs principes : 
                  - améliorer les connaissances et les technologies,
                  - accéder à l'information, 
                  - réviser les politiques,
                  - promouvoir des stratégies collectives,
                  - s'adapter.
Ce plan d'action est bâti pour l'établissement d'un équilibre. Cet équilibre sous entend une cohabitation harmonieuse des personnes et des activités, ainsi que la sauvegarde de l'environnement et des ressources naturelles .

DÉVELOPPEMENT DURABLE

Vivable Viable Supportable
Qualité de vie Cohésion sociale Emploi  Production, consommation Ressources naturelles Écosystèmes
Social Économique Environnementale

Même s'il est préconisé de maintenir une cohabitation harmonieuse des personnes, le législateur (élu du peuple) est parfois amené à trancher. Dans le cas de la protection du loup commun (Canis lupus), les conflits n'ont pas éclaté à la signature de la convention de Berne car le loup sauvage était absent du territoire français. Par contre, lorsque les attaques se sont faites plus fréquentes (dès 1994), des manifestations anti-loup ont vu le jour et ont culminé jusqu'à la destruction à la dynamite d'un pont dans la vallée de la Vésubie.

Le retour du loup a provoqué de profonds changements pour les habitants des Alpes. Les chasseurs ont craint une baisse des effectifs d'ongulés sauvages, ils ont ainsi mieux géré les plans de chasse qui leur étaient octroyés, ils ont de plus bénéficié de lâchers de chevreuils et de grands cervidés censés palier à la hausse de la prédation lupine. La meilleure gestion des plans de chasse, ainsi que la succession de deux hivers peu rigoureux ont permis une explosion des effectifs des populations de proie (sauf la population de mouflons qui a chuté car ils échappent difficilement au loup dans les épais manteaux neigeux). Le retour du loup a donc conforté une activité traditionnelle incarnée par la chasse.

Le deuxième protagoniste serait le monde pastoral. Bien que les éleveurs ovins arguent être les victimes d'une réintroduction menée par le ministère de l'environnement, ils souffrent d'une crise bien plus profonde qui met leur activité à mal. Les manifestations de cette déprise agricole sont nombreuses, et l'on peut dès lors penser que le retour du loup n'arrange en rien les affaires des éleveurs. Cependant, il faut y regarder de plus près. Ils bénéficient maintenant de suivis de la prédation des troupeaux, ils ont vu rouvrir les chemins pastoraux : leur permettant ainsi une meilleure accessibilité des estives. On leur a aussi construit des cabanes de bergers qui ont remplacé les vulgaires tentes qu'ils utilisaient auparavant malgré les intempéries. On peut donc affirmer que les conditions de vie en estive se sont grandement améliorées.

Quant à la prédation lupine effectuée sur les troupeaux, elle est couverte par une indemnisation des attaques lorsque celles-ci s'avèrent être imputables au loup. De plus, les moyens de protection des troupeaux et de prévention des attaques ont prouvé leur efficacité sur les troupeaux bien gardés. Les problèmes liés à l'activité pastorale ne semblent donc être ni d'ordre économique, ni d'ordre technique. Le retour du loup a modifié la conduite d'élevage ; dorénavant, le berger reste présent en altitude avec son troupeau. Cette hausse de la surveillance des cheptels a permis aux éleveurs d'accroître leurs résultats techniques d'élevage.
D'ailleurs, les bergers et les loups " cohabitent " depuis dix ans. Le nombre de meutes progresse et la moyenne d'âge des éleveurs des Alpes-Maritimes est faible (une quarantaine d'années) : montrant ainsi que les jeunes voient l'avenir avec plus ou moins d'optimisme.

Principales conséquences de la présence du loup

Economique Sociale Environnementale
-Hausse de l'activité touristique

-Création d'emplois (aides-bergers, techniciens pastoraux…)

-Création de débouchés avec la labellisation.

-L'éleveur est un acteur du développement de la vallée.

-Unité du monde pastoral (regroupement de producteurs pour labelliser la filière, bulletins d'information…)

-Le loup est l'indicateur biologique d'un environnement vierge, sauvage.

-Maintien de la biodiversité.

  Conclusion :

Le retour du loup a permis de repenser la politique d'aménagement du territoire de toute la zone montagnarde. Il a rapproché le milieu agricole qui s'est vu mobilisé contre un ennemi commun. Les éleveurs, aujourd'hui écoutés, sont les acteurs d'un redémarrage d'une activité économique qui était en perte de vitesse.

Aussi, l'intérêt de conserver le loup dans l'Arc Alpin Français est double : 
- Il répond au niveau éthique au besoin et à la nécessité de maintenir la biodiversité sur Terre. Toutes les espèces, quelles qu'elles soient, doivent, même si cela engendre de nombreux efforts, être conservées et si possible maintenues dans leurs environnements naturels.
- Au niveau du développement local, l'exemple du loup montre qu'une cohabitation durable entre l'homme et les espèces sauvages ne peut s'inscrire que dans un schéma de développement durable. Ainsi, en s'obligeant à protéger les espèces sauvages l'homme se doit de trouver des réponses originales pour vivre en harmonie avec ces dernières, afin que les générations futures bénéficient d'un monde vivable, viable et supportable.

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